L'essentiel Mercredi 25 Janvier @ VIPress.netST-Ericsson : pourquoi STMicroelectronics s’entête
Une fois encore, ST-Ericsson a plombé les comptes de STMicroelectronics en 2011, alors que les résultats de ses activités semiconducteurs à 100% ont enregistré des performances identiques, voire légèrement meilleures que celles des marchés sur lesquels il est présent ; le fabricant franco-italien s’est donc attaché hier lors de la présentation de ses résultats à montrer pourquoi et comment il comptait faire de ST-Ericsson le premier fournisseur mondial de circuits 4G pour le LTE de deuxième génération, à partir de 2013.
L’an passé, ST-Ericsson a enregistré de très mauvais résultats : un chiffre d’affaires en chute de 28%, à 1650 M$, pour une perte nette de 841 M$, contre un déficit de 591 M$ en 2010. Au quatrième trimestre, les ventes de la co-entreprise se sont stabilisées à 409 M$ (contre 412 M$ au troisième trimestre), mais la perte nette a augmenté, passant de 211 M$ à 231 M$, soit plus de la moitié des ventes.
ST-Ericsson a deux problèmes principaux : l’effondrement des commandes de Nokia qui lui a fait perdre environ 1 milliard de dollars de facturations en 18 mois et, dans une moindre mesure, celles de Sony Ericsson qui, il y a quelques années, ont culminé au milliard de dollars également. Ces grands clients ont fait défaut à un moment où l’entreprise n’avait pas achevé sa mue pour se mettre en ordre de marche. Issue du rassemblement des activités circuits pour téléphones mobiles de STMicroelectronics, NXP et Ericsson, ST-Ericsson est disséminé aujourd’hui sur 44 sites dans le monde (contre environ 70 à sa création) dont 6 en France. Didier Lamouche, numéro 2 de ST nommé à la tête de ST-Ericsson pour redresser l’entreprise, estime que l’organisation de l’entreprise n’est pas achevée et qu’il conviendrait de spécialiser les sites avec des responsabilités « de A à Z » pour éviter les doublons de compétences actuels. Refusant à l’heure actuelle de parler de restructuration, il préfère évoquer une transformation de la structure de l’entreprise pour abaisser son point mort et hâter son retour à la rentabilité.
Nous n’en saurons pas plus, le dirigeant devant soumettre son « plan de transformation » à ses actionnaires, vraisemblablement fin mars. Dans l’attente, le chiffre d’affaires du premier trimestre sera « très significativement » inférieur celui du 4e trimestre. En cause la saisonnalité des ventes (historiquement une baisse d’activité de 15%), des grands clients qui, -on l’a vu- réduisent leurs facturations, un niveau élevé de stocks chez certains autres clients et la poursuite de la baisse des ventes des produits anciens que ne compensera pas la montée en puissance des nouveaux produits pour smartphones.
Mais ST-Ericsson a aussi des atouts pour l’avenir. Pour être compétitif sur le marché des smartphones aujourd’hui, il faut rassembler des compétences dans quatre domaines : la technologie modem, les processeurs d’applications, la connectivité et le logiciel.
ST-Ericsson, tout comme Qualcomm, possède les quatre compétences, dont la technologie modem que l’entreprise considère comme la véritable clé d’entrée pour le marché du LTE, alors que les autres concurrents (Broadcom, Nvidia, etc.) ont plutôt comme point d’entrée le processeur d’applications. En outre, alors que ces principaux concurrents sont fabless (donc dépendant des plates-formes de TSMC), ST-Ericsson peut faire appel à la palette de process de ST pour se différentier. Enfin, ST-Ericsson compte davantage jouer les synergies avec ses maison-mères. C’est actuellement en train de se faire au niveau de la R&D avec ST, notamment la division « multimedia convergence platform » qui développe des circuits pour des décodeurs et TV numérique. Ce sera aussi le cas avec Ericsson, dont l’expertise dans les réseaux mobiles pourrait être bénéfique à ST-Ericsson, notamment d’un point de vue commercial (Ericsson connaît les attentes et les projets des opérateurs). Il compte également développer les partenariats avec des entreprises tierces. Fort de cette vision, Didier Lamouche ambitionne de faire de ST-Ericsson le leader mondial des circuits LTE de deuxième génération à partir de 2013. Un objectif qui semble hors d’atteinte aujourd’hui. Mais la volatilité de ce marché est telle qu’il ne faut rien exclure.
Les usines de STMicroelectronics devraient tourner à 75% de leur capacité au premier trimestre
Résilience : c’est le maître-mot employé par Carlo Bozotti, CEO de STMicroelectronics, pour qualifier la performance du fabricant de semiconducteurs en 2011, année troublée par les catastrophes naturelles au Japon et en Thaïlande, le retournement du marché dans la seconde moitié de l’année, la chute des facturations de Nokia et les problèmes macro-économiques ; en dehors de ST-Ericsson (voir article dans cette édition), STMicroelectronics estime en effet avoir fait passer sa part de marché de 5,6% à 5,8% l’an dernier sur les marchés sur lequel il est présent.
Globalement (activité wireless comprise), ST évalue à 177 milliards de dollars le marché sur lequel il est présent.
Lors du dernier trimestre, les usines de ST n’ont tourné qu’à 60% de leur capacité de production. Un ratio qui devrait remonter à 75% au premier et davantage par la suite. Depuis quelques semaines, le fabricant note en effet une remontée des commandes pour ses activités hors ST-Ericsson, mais, échaudé par le retournement de juin 2011, veut adopter une approche prudente pour la remontée de ses cadences de production.
L’an passé, les investissements de ST ont représenté 1,26 milliard de dollars. Un montant qui devrait être inférieur cette année et même inférieur à 10% de ses ventes. Cette année, la priorité en fabrication sera mise sur la flexibilité de son outil de production pour palier les aléas de la conjoncture. Si l’objectif d’un ratio de 20% de la production externalisée aux fondeurs (et des 2/3 pour les technologies Cmos les plus avancées) est maintenu, ST veut se réserver la possibilité d’augmenter sa part en interne pour charger davantage ses usines si le besoin s’en fait sentir.
ST réalise 11% de ses ventes en euros, alors que 44% de ses coûts sont en euros. L’entreprise livre 62% de ses commandes en Asie, alors que sa clientèle d’origine asiatique représente 33% de son chiffre d’affaires. A l’inverse, ST livre 24% de ses commandes dans la zone EMEA, alors que sa clientèle européenne représente 38% des ventes. Pour le continent américain, les ratios respectifs sont de 14% et 29%. Dans l’ordre alphabétique, Apple, Bosch, Cisco, Continental, HP, Nokia, RIM, Samsung, Seagate et Sony/Sony Ericsson ont été ses dix principaux clients OEM l’an passé. A noter qu’au cours des derniers années, le chiffre d’affaires réalisé par ST pour le compte de Nokia a chuté de 1 milliard de dollars. « De 20% de notre chiffre d’affaires, Nokia est passé à 14% en 2010 et compte pour moins de 10% de notre CA désormais », a déclaré Carlo Bozotti.
En dépit des aléas de la conjoncture, ST entend poursuivre sa stratégie d’acteur global qui s’appuie sur deux piliers : d’un côté, l’analogique, la puissance, les mems (600 M$ de CA l’an passé) et les microcontrôleurs pour diverses applications dont l’automobile ; de l’autre, le numérique grand public et le sans fil.
Apple devient le premier acheteur mondial de semiconducteurs
Selon Gartner, les dix premiers acheteurs OEM mondiaux (c’est-à-dire hors sous-traitants) se sont approvisionnés pour 105,6 milliards de dollars de semiconducteurs en 2011, soit 35% du marché mondial ; la croissance de leurs achats a été faible et a atteint 1,8% en un an, soit néanmoins le double de la croissance du marché mondial des semiconducteurs évaluée par Gartner à 0,9%, pour un montant de 302,5 milliards de dollars.
L’an passé, Apple a détrôné HP de son rang de premier acheteur OEM mondial (avec 17,26 milliards de dolalrs d’achats), devant le Coréen Samsung (16,7 milliards) et… HP, dont les achats ont reculé de 5,5%, à 16,6 milliards. Les smartphones, les tablettes et les disques de stockage à état solide (SSDs) ont été les trois moteurs des achats l’an passé. Dans les smartphones, le classement célèbre les meilleurs fabricants de téléphones mobiles intelligents (Apple, Samsung et HTC) et stigmatise les fabricants de mobiles qui ont raté le coche (Nokia et LG Electronics), souligne Gartner (voir illustration). A noter que derrière Apple, le Chinois Lenovo est celui du top10 dont les achats de semiconducteurs ont progressé le plus vite l’an dernier (+23,7%).
Nette remontée des commandes d’équipements pour SC en décembre
On a assisté en décembre à un net rebond des commandes d’équipements pour la fabrication des semiconducteurs, que les machines soient américaines ou japonaises ; si le mouvement se poursuit en janvier, on pourra parler d’inversion de tendance, alors que le trio de tête des investisseurs (Intel, Samsung et TSMC) pèse d’un poids considérable sur le secteur (près de la moitié des dépenses totales prévues pour 2012).
Selon SEMI, les prises de commandes en équipements US pour la fabrication des semiconducteurs ont représenté 1,16 milliard de dollars en décembre, soit 18,5% de plus qu’en novembre 2011 et 26,7% de moins qu’en décembre 2010. Les facturations ont pour leur part augmenté de 11,8% en un mois, à 1320 M$, et ont été inférieures de 25,2% à celles de décembre 2010. Le book-to-bill (rapport commandes sur facturations) des fabricants d’équipements américains a légèrement remonté à 0,88, contre 0,83 en novembre, 0,74 en octobre, 0,71 en septembre, 0,80 en août et 0,85 en juillet.
Selon la SEAJ (Semiconductor Equipment Association of Japan), les commandes en équipements pour SC japonais ont représenté 100,788 milliards de yens en décembre (1304 M$), en hausse de 24,7% par rapport à novembre 2011, et en baisse de 5,7% par rapport à décembre 2010. Les facturations ont, pour leur part, progressé de 1,2% en un mois, à 84,318 milliards de yens (1090 M$) et ont été inférieures de 15,2% à celles de décembre 2010. Le book-to-bill japonais est remonté à 1,20, contre 0,97 en novembre, 0,83 en octobre, 0,75 en septembre, 0,76 en août et 0,84 en juillet.
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