L'essentiel Vendredi 30 Décembre @ VIPress.net

Ni pénuries, ni surcapacités de productions de semiconducteurs en 2012

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30/12/2011 11:10:53 :

Nous prévoyons pour 2012 une croissance de 4% pour le marché mondial des semiconducteurs, au mieux - Pour une fois, comme le consensus – Explications… par Jean-Pierre Della Mussia.

Nous avons été heureux de fournir ces dernières années à nos lecteurs des prévisions de croissance du marché du semiconducteur qui se sont révélées justes, en particulier pour 2010 grâce à notre prévision de plus de +30%, à 300 milliards de dollars, complètement au-delà du consensus début 2010. De même pour 2011, de 0% (après Fukushima), contre « au moins +5% » pour le consensus ([L]http://semiconductor.vipress.net/?id=tvufwvthofjpdmpqjc|voir notre article[/L]). Si notre prévision de +4%, au mieux, pour 2012 est « banale », au moins expliquons-nous dans les lignes qui suivent comment elle sort du chapeau. Ce qui est quasi certain en tout cas est qu’il n’y aura pas de pénuries de semiconducteurs en 2012 et que, côté fournisseurs, il n’y aura pas non plus, sauf exceptions, de capacités de production démesurément excédentaires.

Pourquoi tout d'abord avons-nous vu juste, avec une croissance nulle, pour 2011 ? Simplement par ce que nous n'avons pas sous-évalué les stocks de semiconducteurs existants au moment de Fukushima, ce qui nous a permis d'anticiper, après les trois mois d’incertitude qui ont suivi, le très important déstockage qui a eu lieu dans toutes les branches de l'électronique. Les analystes font en effet toujours la même erreur : ils estiment l'importance des stocks au jour près pour les semiconducteurs nus, mais sont incapables d'évaluer les stocks de semiconducteurs qui n'en ont pas le nom. Par exemple ceux qui existent montés sur des cartes chez les fabricants de cartes, ceux qui sont présents sur des cartes finies ou non finies chez les sous-traitants, ceux qui sont intégrés dans des systèmes eux-mêmes en stock chez les fournisseurs ou les grossistes (téléviseurs, boxes…), ou même en cours de transfert logistique entre sous-traitants et lieux de livraison (quatre semaines de stocks forcés sur des bateaux en provenance d'Asie par exemple). Bref, cette année, comme d'habitude en pareilles circonstances, quasiment tous les analystes sont tombés dans le piège.

L’impact de l’incertitude macro-économique en 2012
Qu'en sera-t-il pour l'an prochain ? Nous devons changer notre façon de raisonner chaque année, en fonction des circonstances qui ont, malheureusement, une fâcheuse tendance à changer du tout au tout d'une année sur l'autre. Bien entendu, pour 2012, l'incertitude macro-économique va dominer les soucis. Normalement, elle n'influe que moyennement sur la vie du semiconducteur par rapport aux autres paramètres (contrairement à une opinion répandue) ; mais, cette fois-ci, son caractère exceptionnel risque de lui faire dicter sa loi.

Notons que la pénurie de disques durs actuelle, due aux récentes inondations en Thaïlande, aura un impact légèrement positif en 2012 : cette pénurie a en effet eu pour conséquence de ralentir considérablement les fabrications de PC fin 2011, et donc d’assécher complètement les faibles stocks prévus pour janvier. Il y aura donc d’une façon ou d’une autre un certain rattrapage au niveau des productions de PC début 2012. Mais l’impact sera probablement inférieur à 0,5% sur la croissance 2012 du marché des semiconducteurs.

Une croissance économique mondiale de l’ordre de 3%
Le consensus de croissance du PIB mondial pour l'an prochain est encore à plus de +3,5% (la croissance des émergeants « compensant » la faiblesse des occidentaux).


Lors d’une intervention au Sommet Européen de la Microélectronique fin novembre dernier, Bill McClean, éminent prévisionniste d’IC Insights, a présenté un historique des corrélations entre la croissance économique mondiale et la croissance du marché des semiconducteurs. La croissance 2012 ne sera perturbée ni par des pénuries de semiconducteurs, ni par des surcapacités de productions exceptionnelles, ce qui lui donne un caractère prévisible. Malheureusement, l’incertitude macro-économique risque cette fois-ci de dicter sa loi.

Nous ne retiendrons pour notre part que +3%, tout d'abord parce que l'austérité occidentale aura probablement un impact plus négatif que prévu sur la croissance, et ensuite parce que tous les chefs d'entreprise que nous rencontrons (et nous-mêmes) estiment que l'inflation en Chine est de 3 à 5% supérieure à celle qui est annoncée. Si la croissance de la Chine est annoncée à 12%, cela voudrait donc dire que la croissance réelle est à 8 %, ce qui est déjà extraordinaire. Mais si cette croissance annoncée tombe à 8%, cela voudrait dire que le réel tombe à 4%. Excellent pour nous ; un peu catastrophique pour les Chinois qui n'en ont plus l'habitude, et par ricochet pour l’industrie électronique.

Le déstockage n'est pas encore terminé
+3% de croissance générale mondiale, ce ne serait pourtant pas si mal. Certains sont plus pessimistes (et leurs données représenteront peut être bientôt un nouveau socle de réflexion si d’autres organismes, comme le FMI, les rejoignent*). +3%, c'était un taux dont le marché bénéficiait très fréquemment avant que les émergeants ne fassent leur véritable entrée en scène, essentiellement à partir de 2004. Ce taux correspondait à peu près à un taux de croissance du marché des semiconducteurs de 9 %, hors effet de stockage et variations de prix. Nous partons ainsi pour notre calcul de prévision 2012 de +8% (entre temps, les gains de productivité des sous-traitants [TSMC, UMC…] ont encore fait baisser la croissance moyenne, non pas en nombre de pièces bien sûr, mais en dollars). Nous admettons que l'ensemble des déstockages n'est pas encore terminé, mais qu'il n'impactera pas négativement la croissance de plus de 2%, soit 6% de croissance pour la production en dollars. Chaque fabricant va vouloir utiliser au mieux ses capacités de production et va sans doute admettre qu'une baisse de prix de 2% est envisageable à cette fin. Il nous reste 4% de croissance possible en dollars. Sans problèmes de pénurie puisque nous sommes en phase de déstockage. Sans gros problèmes non plus de surcapacités de production car, en cumulé, les investissements des sociétés de semiconducteurs depuis 2008 ont été d’un niveau plutôt en dessous de la moyenne. Comme chaque année, bien sûr, nous prierons pour qu'il n'y ait pas de tremblement de terre à Taiwan. Le monde de l’électronique est malheureusement condamné, pour longtemps, à vivre avec cette menace pour les populations qui est aussi une menace de pénurie de semiconducteurs potentielle pour l’électronique.

JP Della Mussia

Si vous souhaitez réagir à cet article, vous pouvez contacter Jean-Pierre Della Mussia à l’adresse suivante : [L]mailto:jpdmjp@yahoo.fr|jpdmjp@yahoo.fr[/L]
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*Il n’est malheureusement pas possible d’exclure comme base de prévision pour l’électronique un scénario macro-économique plus pessimiste que celui d’une croissance mondiale 2012 de 3% retenu ici. Dans son édition de janvier, le mensuel l’Expansion a tenté de prévoir la croissance 2012 dans 180 pays. Notre confrère n’en déduit pas de croissance mondiale globale mais nous avons fait le calcul à partir de ses données. Le résultat est préoccupant : +2,35% (alors que certains prévoient encore +4% !). Dans ce cas, notre scénario serait trop optimiste et, disons-le franchement, difficile à rectifier avec une fiabilité suffisante (pour cause d’effets cumulatifs non vécus dans une époque récente, donc difficiles à traduire dans des chiffres) : la chute des prix passerait probablement à au moins 3% et la croissance du marché pourrait peut être glisser en terrain négatif…

[L]http://semiconductor.vipress.net/re.php?u=http://www.vipress.net/conjoncture2012.pdf&p=1234JPDM5678|Version de cet article en pdf[/L]


VIPRESS.NET VOUS SOUHAITE UNE BONNE ANNEE 2012

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30/12/2011 11:36:14 :


Pour ce numéro de rentrée et bien démarrer l'année, VIPress-net vous propose l'analyse de la conjoncture 2012 en semiconducteurs de Jean-Pierre Della Mussia : un exercice périlleux que l'artiste réalise sans filet mais toujours avec bonheur ; Elisabeth Feder, rédactrice en chef de l’Echo du Solaire et Pierrick Arlot, rédacteur en chef d’Europelectronics s’associent également à nous pour vous présenter tous nos vœux de bonheur et réussite tant professionnelle et personnelle pour 2012…

Frédéric Fassot.

Nous reprendrons demain le cours de l'actualité.



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